Le renouveau charismatique dévoilé

 

 

Un livre paru récemment chez Golias, et signé par C. Terras « Charismatiques, une église dans l’Eglise » tombe à point nommé pour répondre aux questions que se posent à juste titre,  de plus en plus  de catholiques dont bon nombre de prêtres, devant un phénomène irrationnel, émotionnel et trop souvent  hystérique,  qui phagocyte notre Eglise :  D’où vient ce renouveau ?  Qui sont les initiateurs de sa doctrine ? Quelle est-elle et d’où vient-elle ? Quelle est sa théologie ? Son but ? Que sont ces dits ministères de délivrance, de guérison ? D’où viennent-ils ? Qui les a initiés et pourquoi ?  Le baptême dans l’Esprit : quelle est son origine, sa doctrine, sa théologie ? Est-elle catholique ? Quelle est la finalité de cette mouvance charismatique ?

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Ces questions, aujourd’hui, ne peuvent plus être éludées face à l’ampleur du phénomène qui  ferait oublier que les charismatiques sont entrés dans l’Eglise en catimini. En effet, c’est après mai 68, que se sont présentées aux portes de notre Eglise, des personnes  aux parcours chaotiques,  revenues des chemins de Katmandou, de la méditation transcendantale, de Lanza del Vasto ou d’ailleurs, voire transfuges d’églises pentecôtistes, à la recherche du paradis perdu. Auréolés de leurs ambiguïtés à la mode du temps, ces nouveaux venus ont vite fait des adeptes en mal de repères, qui se retrouvaient dans cette « recherche intérieure« . Ensemble ils ont fondé de nouvelles communautés. Des nouveaux comportements religieux surprenants pour les catholiques d’après Vatican II qui voyaient là un épiphénomène marginal à l’Eglise, pour accueillir selon l’expression désormais consacrée, les « blessés de la vie« .

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Ces fondations s’enfilant les unes derrière les autres sans plus de discernement, l’Eglise prudente, leur a donné des évêques pour les suivre. Emballés par le nombre exponentiel de ces nouveaux « convertis« , qu’ils ont vite qualifiés de  » chance pour l’Eglise »,  ils  n’ont guère été vigilants sur la doctrine des fondateurs et l’origine du mouvement. Pour exemple, Ephraïm a fondé Le Lion de Judas devenu communauté des Béatitudes, suite à une vision de Kathryn Kuhlmann, dans une église évangélique des USA qu’il fréquentait alors. Comme bien d’autres, si la façade de sa communauté apparaissait catholique, la doctrine était celle de sa source : pentecôtiste.  Célébrations émotionnelles, chants en langues, baptême dans l’esprit, guérisons,  etc. Des nouveautés séduisantes où les évêques ont voulu voir le souffle de l’Esprit de Vatican II. Et pour suivre, ils ont suivi, au sens propre du terme, cautionnant avec émerveillement les « charismes » des uns et des autres, les sessions et rassemblements de guérison, les chants en langues,  tout comme les ministères auto-proclamés dont celui dit de délivrance donné à des laïcs, ministère  dont on cherche encore la théologie catholique mais dont on a découvert avec effarement les dégâts. Quant à leur religiosité-doctrine psycho-spirituelle venue du Nouvel-Âge, elle s’est « enrichie » de PNL, Analyse transactionnelle, Hypnose Erycksonienne, Ennéagramme, etc.,  selon l’imagination – ou le délire ? – des psychothérapeutes auto-proclamés au nom de la foi, qui faisaient et font  recette de ces pratiques. A tel point qu’on peut se demander si les évêques « suiveurs » n’y ont pas trouvé leur compte ? D’autant plus que cette nouveauté « dans le vent » (lequel ?) de « docteurs-es-blessures-guérisons » bien insérée dans l’Eglise rameutait et rameute encore de partout, dans ces sessions calamiteuses et financièrement juteuses,  des adeptes de l’ego qui prennent le risque d’en sortir délabrés

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Cela soulève la question des finances : sachant que la majorité de ces fondateurs de communautés n’avait pas d’argent en entrant dans l’Eglise, on ne peut qu’être surpris devant leur patrimoine immobilier et leurs moyens financiers. Comment de pareilles fortunes ont-elles pu se faire ? Patrick Sbalchiero a soulevé cette question dans un article publié dans le N° 154 de Golias Magazine de Janvier-février 2014, dont voici la présentation de Golias:

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« Le renouveau charismatique regroupe une centaine de mouvements religieux et de groupes de prière à travers le monde, des plus humbles aux plus fortunés et influents. Aucune activité d’aucune sorte n’est gratuite en leur sein. Tout est payant et le prix fort : sessions, retraites, enseignements, livres, CD, et même exorcismes, au mépris le plus complet de la pure tradition catholique. Ainsi depuis cinquante ans, le renouveau charismatique a t-il réussi à devenir un filon très lucratif. Il suffit de jeter un simple coup d’oeil sur le parc immobilier détenu par les communautés : il est alors nécessaire de compter par millions d’Euros. Serait-ce à dire que la parole de Dieu et les trop fameux charismes seraient devenus l’objet de transactions ? Avec l’aval de nombreux évêques ? Nous sommes contraints de répondre par l’affirmative lorsque nous observons l’enrichissement d’importantes structures (comme les Béatitudes, l’Emmanuel, le Chemin neuf)) mais aussi de fondateurs dont un certain nombre n’a pu par ailleurs échapper à la justice

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Contributions volontaires des adeptes, captations (involontaires) de revenus divers et souvent opaques. La masse d’argent brassée n’a cessé de croître. Mais ce gonflement inopiné pose une question de fond : leaders du renouveau charismatique et acteurs financiers (catholiques) ne marchent-ils pas de concert ? »

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Comment le renouveau empirique des années 70, a t-il pu devenir un raz-de-marée d’une telle envergure ?  C’est que cette dite mouvance qui paraissait informelle venait en réalité du Canada, bien structurée et bien pensée. Bénie par les évêques « suiveurs« , rapidement accueillie au Conseil Pontifical des Laïcs, au  Vatican où elle a fondé l’ICCRS : le Renouveau Charismatique Catholique International, tête pensante et dirigeante du renouveau aux puissants moyens financiers. L’ICCRS a mis en place une structure pyramidale très structurée, de responsables et de leaders  qui prônent et diffusent sa théologie dans le monde entier : une église dans l’Eglise. Bien implantée de la sorte, il ne lui restait qu’à revenir à son origine en rejoignant les évangéliques par ladite  » troisième vague du renouveau« , baptisée « renouveau œcuménique ». De facto, le renouveau né dans le pentecôtisme ne l’a jamais quitté. Sa mystification, cautionnée par les évêques, a été de se glisser dans la coquille catholique et d’y remplacer la foi des apôtres par sa croyance dans le dieu guérisseur d’un messianisme temporel. Pourquoi  l’Eglise a t-elle  laissé se mettre en place une telle imposture ?

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La réponse semble évidente : le but en est la nouvelle évangélisation tenue par les leaders du renouveau  qui drainent des foules en liesse et offrent une vision enthousiaste de l’Eglise. Peu importe si ce n’est plus la foi humble et aimante transmise depuis 2000 ans, on veut y voir maintenant  la foi triomphante et conquérante de cette génération spontanée du souffle de l’esprit : La nouvelle pentecôte de la nouvelle église. Par son important dicastère romain, c’est la nouvelle évangélisation du renouveau qui devient la nouvelle évangélisation de l’Eglise catholique. On peut comprendre à la lumière de cet éclairage et de cet enjeu,  que les victimes des dérives sectaires du renouveau, très dérangeantes,  aient toujours été rejetées. Cette vague avance  en  balayant tout sur son passage mais aussi, ce que l’Eglise n’a peut-être pas bien évalué,  en entrainant ses adeptes on ne sait où: cette vidéo en ligne nous donne un aperçu du rassemblement des religieux et religieuses de France à Anthony « pour témoigner de leur foi à suivre le christ » :

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On danse, on chante, on joue, on se déhanche … Nous sommes dans les grandes manifestations charismato-dingos qui donnent une  idée effarante et affligeante de l’état de leurs adeptes,  en l’occurrence des religieux !

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La nouvelle évangélisation des jeunes est un enjeu majeur bien ciblé. Beaucoup de parents s’en inquiètent à juste titre en voyant, outre ces rassemblements,  de prétendus « grands témoins » frappés de « charismes« ,  prophètes de leur vie souvent bien amochée : ex-taulards, ex-drogués, ex-délinquants, rentrer dans les aumôneries où ils fascinent et séduisent les jeunes par l’exhibitionnisme de leur vécu qui relève de lamentables faits divers, vécu transformé en histoire sainte.  Du malsain troqué en merveilleux pour finir en virtuel. N’y a t-il pas mieux à offrir à des jeunes ?

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Que dire des « célébrations » dudit  baptême dans l’esprit, passage obligé de la nouvelle église,  où les gens tombent comme des mouches « dans le repos dans l’esprit »? Pour ceux qui observent, il se pourrait bien que ce saint esprit pratique des méthodes d’hypnose ?…

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Que dire encore des exorcismes sauvages qui font recette, appelés aussi « délivrance », du diable bien sûr, dont les personnes sortent délabrées ? Il suffit de visionner sur le net

l’émission de Canal +, de Sophie Bonnet  » Les Béatitudes, une secte aux portes du Vatican  » pour en voir l’horreur.

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Aujourd’hui, devant ce déferlement de la nouvelle évangélisation, qui parait sans limite et dont on ne sait jusqu’où il peut dégénérer, il semble que l’Église romaine ne maîtrise plus rien Cette mouvance organise des rassemblements de milliers de personnes, avec des « guérisseurs », évangéliques et catholiques bien connus, des foules « chauffées » pour ne pas dire  hystériques, des effusions de l’esprit, voire des « délivrances »  et les incontournables guérisons annoncées. Hormis que nous aimerions connaître les dossiers médicaux qui en attestent. Les adeptes courent d’un rassemblement à l’autre et suivent les gourous rencontrés dans leurs  réseaux très  structurés où l’on trouve une multitude de communautés et d’associations, toutes prometteuses du bien-être promis qui bien sûr, a un coût financier.  

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La théologie de la nouvelle évangélisation est celle de l’ICCRS dont les publications,  supplantent désormais la doctrine de la foi. Notre Pape, les responsables ecclésiaux prônent à temps et contretemps cette nouvelle évangélisation comme l’avenir de l’Église.  En « oubliant » de dire qu’elle est enracinée dans les communautés charismatiques dont les dérives sectaires gravissimes ont fait la une des médias. D’ailleurs, ne sert-elle pas à faire passer à la trappe les scandales et les victimes dont l’Église devrait avoir honte et dont les catholiques se seraient bien passés ?  Qui pourrait encore croire après cela  que les charismatiques sont la chance de l’Église ? Pendant que leurs responsables s’auto-glorifient dans des méga-rassemblements délirants, les plus hautes autorités romaines ne seraient-elles pas en train de saborder l’Église ?

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Qui eut cru dans les années 1970, lorsque les hippies du Nouvel Âge sont entrés dans l’Église en tapinois  pour fonder de nouvelles communautés, que leur quête d’un dieu à leur image  tracterait autant de foules ? Qui eut cru qu’ils investiraient les autorités romaines ? Qui eut cru qu’ils recruteraient autant de jeunes, séduits et souvent détournés de vocations classiques (prêtres de paroisse, religieux, moines etc.) Bien des responsables de couvents, tout comme des prêtres séculiers, en prennent la mesure aujourd’hui  devant la désertification des séminaires et des noviciats au profit de ces nouvelles communautés. Plus grave : combien de jeunes et de moins jeunes, qui se sont engagés avec générosité et enthousiasme dans ces communautés pour donner toute leur vie, en sont sortis des années après bien abîmés. Pourquoi l’Église n’a-t-elle jamais fait un audit pour connaitre le nombre de personnes recrutées et combien ont été laissées au bord de la route ? Sans aucune aide, les communautaires n’avaient ni cotisations de retraite, ni cotisations sociales. De facto, ils ont donné leur vie aux seuls besoins et  profits de la communauté.  Que sont-ils devenus ? Cela pose la question : quel avenir ont à offrir ces communautés charismatiques qui ont toujours le vent en poupe et le soutient sans faille de Rome ? Pendant ce temps, les monastères ferment les uns après les autres, les prêtres de paroisse manquent. La nouvelle évangélisation a fait son œuvre. Il est temps que soit fait un bilan du renouveau, de ses communautés, de sa doctrine, de ses activités, de ses finances, de sa nouvelle évangélisation et de ses dégâts humains.

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