Psycho-spirituel et faux souvenirs

 

Qu’est-ce que le psycho-spirituel ?

 

 

C’est un amalgame construit entre les plans psychologique et spirituel, qui induit une confusion de la raison de manière à manipuler une personne. Les pratiques de la manipulation se font par l’utilisation de la foi catholique dévoyée.

 

Cela se passe sous couvert de « retraites » spirituelles. Les personnes sont donc, en confiance, dans une session reconnue catholique. Portant le discours sur le schéma « blessures-guérison » ne l’est pas. Voici sa clé de lecture :

Le péché n’est plus un acte commis librement et volontairement  mais un manque d’amour subi dont on n’a pas conscience et dont on doit se libérer. De la sorte, le péché devient une blessure dont on incombe la responsabilité au bouc émissaire désigné dans la prétendue thérapie. Pour guérir, il faut couper les liens avec le ou les boucs émissaires, souvent des proches, auxquels la personne va faire subir des actes inhumains sans aucune culpabilité, puisque d’une part, ils sont nécessaire à la « guérison », d’autre part la culpabilité est rejetée sur les proches qui, dans ce schéma, sont révélés maléfiques et donc ne font que subir la juste punition de leur faute.

Dans ce tour de passe-passe, la culpabilité et la responsabilité ont sombré. Une personne qui n’est ni coupable ni responsable de ses actes, n’est pas libre. Donc sa liberté a été remise au gourou qui l’instrumentalise contre ses proches. La culpabilité de la personne est détournée au profit du gourou car la faute sera désormais de ne pas se soumettre à ses exigences. Chaque « faute » engendrera une telle culpabilité de l’adepte qui coupé des siens, se trouve emprisonné dans une soumission totale.

 

Ce travail de déstructuration-programmation s’amorce en faisant sombrer l’esprit critique pour ouvrir la porte du psychisme et y injecter la religiosité déviante, vectrice de la manipulation qui va induire de faux-souvenirs. Cela se fait par des expériences empiriques « faisant remonter les émotions ». C’est-à-dire, en jouant dans le seul registre de l’inconscient et de l’émotionnel, interprété par le gourou, qui met de la sorte la personne sous emprise.

 

1 ) – Cette première étape se fait par la séduction, en effet :

Ces « sessions » se font dans un endroit voulu chaleureux, la personne devient pour le gourou « le centre du monde », elle est « écoutée », rassurée, elle se sent donc unique, comprise, « aimée » et entre dans une dépendance fusionnelle avec lui. Par ailleurs, l’esprit critique baisse la garde car cela se passe dans une communauté religieuse, ce qui avalise ces pratiques. L’autorité et la doctrine du gourou ne sauraient être remises en cause dans ce lieu.  

2) – Les thérapies sauvages camouflées en sessions de guérison ou autres appellations aussi fumeuses dont personne ne peut dire clairement ce que les mots regroupent, se font sous couvert de l’évêque du lieu puisque le responsable-« thérapeute » est placé sous son autorité.

3) –  Le psycho spirituel se présente comme un chemin de guérison, jamais défini ou précisé clairement, qui se dit dans la doctrine catholique. La confusion commence déjà dans le fait que certaines personnes se croient dans une retraite spirituelle, d’autres dans une démarche thérapeutique qu’elles pensent plus rassurante qu’une vraie démarche de psychothérapie, perçue comme déstabilisante.

4) – La personne qui ne connaît pas la théologie, fait confiance au « gourou » investit du savoir et du pouvoir.

5)- La personne est sécurisée, rassurée. Le responsables comprend ses « problèmes » qui viennent des blessures de l’enfance et il a la solution : les thérapies psycho-spirituelles.

 

            A ce stade, elle est déjà un jouet dans les mains du « gourou ». Elle va laisser son esprit critique et son bon sens à la porte de la communauté.  Elle fait confiance et se livre ainsi au « thérapeute » et à sa doctrine. Elle n’est plus dans une logique d’observation, de discernement et de décision. Elle est dans une démarche d’accueil et de remise en cause de son vécu, selon le schéma imposé, où sa liberté est remise au « thérapeute », seul initié de ce parcours, qui seul peut lui révéler ses blessures.

 

            L’ignorance, la confiance et l’aval de l’Eglise ont permis la séduction. Le travail  de déstabilisation va commencer :

 

1 – Le temps de la thérapie :

Le « thérapeute » utilise la fragilité, le mal-être ou la souffrance, liés aux manques de la personne, il va trouver la faille pour l’amener à « découvrir » qu’elle a subi des blessures qui sont par lui, tantôt supposées, tantôt interprétées ou suggérées. Des blessures qui reposeront sur de faux souvenirs induits.

 

Pour comprendre le fonctionnement concret de ce système, voici analysé le processus décrit par l’un des initiateurs de ces théories, dans un article intitulé « la guérison spirituelle et son accompagnement psycho-spirituel », article paru dans la revue « Carmel » n° 75.

 

Voici ce qu’il dit :

« Le chemin de la guérison intérieure » consiste:

« A  prendre conscience de l’existence d’une  blessure, d’un manque à être aimé… »

Le texte qui suit de est fondamental pour comprendre car il démontre la pratique utilisés pour faire venir cette prise de conscience, par des clichés, qui servent à créer des émotions interprétées dans une relecture imaginaire du passé, selon son schéma :

1) – Par la « La libération des émotions »

« Cette prise de conscience passe toujours par une reviviscence émotionnelle. Il est très important de bien le comprendre. Nous ne sommes pas encore au niveau d’une connaissance intellectuelle ; ce premier stade de la guérison concerne l’affectivité et le vécu intérieur du cœur »

 

2) –« au cours de l’entretien : grâce à une bonne qualité d’écoute, vous permettez à la personne de dire ses émotions. Dans d’autres cas, elles remonteront à l’occasion d’une circonstance analogique en utilisant certaines techniques comme la PNL.(programmation neuro linguistique). Vous  évoquez par exemple un évènement d’enfance en demandant à la personne de se servir de son imaginaire.  Mettez cette petite fille de huit ans en face de vous sur cette chaise » et vous lui désignez un siège vide. Vous y êtes ? Vous la voyez attachée, les mains liées derrière le dos, et frappée avec une ceinture par ses deux frères ? Maintenant, faites la parler, en exprimant tout ce qu’elle ressent dans une telle circonstance ».

 

3) –«  Sans s’en rendre compte, la personne entre dans le jeu et fait parler l’enfant qu’elle imagine en face d’elle. Mais elle entre dans une dissociation intérieure : l’adulte ne réussit plus à faire censure et dévoile le petit enfant qui est en elle ».

 

4) – En imaginant ce que la petite fille peut ressentir, elle s’implique personnellement, presque sans le vouloir. Notez alors ce qu’elle dit et au besoin arrêtez la au moment précis en lui renvoyant ce qu’elle est en train de dire. Elle s’entendra dire ainsi ce que ressent l’enfant en elle. Le contrôle de l’adulte – qui fait attention à ne pas laisser l’enfant se manifester-  est dépassé par le jeu de cette technique très simple. Soudain remontent les émotions censurées de l’enfance, celles que la petite fille porte dans son cœur : la peur, la douleur, la haine. La personne adulte pourra se demander : »

 

5) – Mais pourquoi ai-je dit cela ? Pourquoi est-ce que je ressens une telle émotion quand je parle ? Si j’imagine cela, n’est-ce pas parce que je le porte en moi ?

 

Reprenons les points-clés de cette psycho technique  :

– « Vous évoquez par exemple un événement d’enfance en demandant à la personne de se servir de son imaginaire »

Le « gourou »  dit clairement faire appel à l’imaginaire ; on n’est plus dans l’évènement réel, donc dans le vécu.

 

 – « Sans s’en rendre compte, la personne entre dans le jeu »

La personne n’est plus consciente du jeu dans lequel « l’accompagnateur » la fait entrer. Elle  n’est plus dans son vécu mais devient le jouet de l’accompagnateur.

 

  – « …elle entre dans une dissociation intérieure : l’adulte ne réussit plus à faire censure »

La personne n’a plus de barrière mentale pour faire censure, donc plus de défense, elle est livrée à ce jeu de l’imaginaire où vont surgir les faux souvenirs que l’accompagnateur va suggérer, induire ou même fabriquer. Par ailleurs, mettre quelqu’un en dissociation mentale est aussi grave qu’irresponsable. C’est vraiment jouer à l’apprenti sorcier.  

 

 – « …elle s’implique personnellement presque sans le vouloir»

On voit comment la personne, dans un état d’inconscience s’implique sans le vouloir, c’est-à-dire bascule sans le savoir dans une histoire suggérée qu’elle s’approprie, hors de son vécu, donc bien en dissociation intérieure, c’est-à-dire en dissociation psychique.

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–  « Si j’imagine cela, n’est-ce pas parce que je le porte en moi ? »

Le but est atteint : elle fait sienne l’histoire suggérée qu’elle a imaginée et dans laquelle elle a basculé. Pour elle, cette histoire sera désormais vraie et  indissociable de son vécu qui va l’intégrer et se remodeler à partir de cet apport fictif.

            Pour comprendre la dangerosité de ce processus de mise sous emprise où se fabriquent de faux souvenirs, qui vient de se vivre, lisons dans la revue POUR LA SCIENCE n° 242 Décembre 1997, Un article d’Elizabeth Loftus sur « les faux souvenirs induits »  qui explique les choses très graves qui se passent ici :

 

 « Les faux souvenirs sont souvent composés par la combinaison de souvenirs réels et de suggestions de tiers (…), ils peuvent également être engendrés lorsqu’une personne est encouragée à imaginer des évènements spécifiques qu’elle a vécus sans se soucier de la réalité. »

« Des travaux scientifiques portant sur plusieurs centaines d’expériences faites sur plus de 20000 personnes ont permis d’explorer comment  l’exposition à de fausses informations altère la mémoire. L’ensemble de ces travaux montre que la désinformation peut modifier les souvenirs de manière prévisible et parfois spectaculaire. Il a été démontré que les souvenirs les plus anciens sont le plus facilement manipulables. »

L’auteur parle de  l’inflation de l’imagination :

« Lorsque certains psychothérapeutes encouragent leurs patients à imaginer des évènements de leur enfance afin de retrouver des souvenirs enfouis. (…) le fait d’imaginer un évènement le rend plus familier, et la familiarité serait alors faussement associée aux souvenirs d’enfance. Les résultats montrent que plus une personne passe de temps à imaginer une action non réalisée, plus elle juge ultérieurement que cette action a bien eu lieu. (…) Une procédure de suggestion relativement simple suffit pour construire des souvenirs complexes, vivaces et détaillés. »

L’auteur démontre ensuite comment  les faux souvenirs se forment :

« On peut stimuler la construction du souvenir en demandant à la personne d’imaginer des évènements lorsqu’elle a des difficultés à se souvenirs. Enfin, on peut les encourager à ne pas s’interroger sur la réalité de leurs constructions. Les faux souvenirs se créent facilement lorsque les facteurs externes sont présents, dans une situation expérimentale, dans un contexte thérapeutique ou dans les activités quotidiennes. Les faux souvenirs s’élaborent par combinaison de vrais souvenirs et de suggestions provenant d’autres personnes. Au cours du processus, les sujets sont susceptibles d’oublier la source de l’information. C’est un exemple classique de confusion de source où, le contenu et la source sont dissociés. »

 

La conclusion démontre la gravité de la manipulation :

«  Bien que le travail expérimental sur la création de faux souvenirs fasse douter de la valeur des souvenirs enfouis depuis longtemps, il ne les invalide absolument pas. En revanche, il montre que, sans corroboration, même un expert ne peut différencier les vrais souvenirs de ceux qui ont été créés par la suggestion. »

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