Le nouvel Enfant Jésus : « Bébé-gourou »

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Ce sont des cohortes de cathos, plutôt nantis, qui se précipitent vers ces sessions coûteuses où l’on « revisite son histoire sous le regard de Dieu ». Sans autre explication que ce programme séduisant. Or, il s’agit de sessions psycho-spirituelles dont les risques sont bien démontrés aujourd’hui, y compris par le rapport de la conférence des évêques de France

« Groupe de réflexion spirituel et psychologie »

.La raison de leur succès, et du recrutement des nouvelles communautés, réside dans le fait qu’elles sont le fondement du renouveau charismatique qui est exponentiel :

Une OPA sur l’Eglise

.Mais aussi parce qu’elles sont séduisantes pour des jeunes généreux qui veulent engager leur foi, pour des personnes en recherche de développement personnel, ou de « guérison » à leur mal-être, ou des personnes en difficulté psychologique qui pensent que Dieu va les guérir et remplacer une indispensable thérapie. Il y a aussi le snobisme bobo-catho : pour être dans le vent, il faut avoir fait sa session de guérison… C’est donc par un embarquement de retour jusqu’au tout début de la vie, que l’histoire de la personne sera remontée, revue, dans la quête de l’enfant parfait à restaurer pour « guérir ».

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Les théories de cet enfant parfait sont le postulat bien camouflé de cette doctrine déviante.

 

« Revisiter son histoire sous le regard de Dieu »

 

Un travail qui se fait par étapes :

 

– Dans un lieu d’Eglise

Ces sessions de guérison arrivées avec le renouveau charismatiques dans les années 1970, ont le label catho. Elles se font dans des diocèses, donc avec l’aval de l’évêque du lieu. Les théoriciens de ces pratiques psycho-spirituelles, dans leur plus grande majorité, sans un diplôme de psychologue clinicien nécessaire pour suivre des gens en thérapie, sont reconnus malgré cela comme véritables « docteurs-es-blessures-et-guérison ». Il suffirait  donc d’être charismato- catho pour être « thérapeute » ? Et mélanger une religiosité à une pseudo psychologie pour que Dieu guérisse ?

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– Les faux souvenirs induits

Par des techniques psycho-sectaires d’apprentis-sorciers, on va « revisiter » les étapes de la construction de la personnalité, pour la déstructurer et la remodeler selon le schéma de la doctrine déviante. « C’est un amalgame construit entre les plans psychologique et spirituel, qui induit une confusion de la raison de manière à manipuler une personne. Les pratiques de la manipulation se font par l’utilisation de la foi catholique dévoyée.

Ce travail de déstructuration-programmation s’amorce en faisant sombrer l’esprit critique pour ouvrir la porte du psychisme et y injecter la religiosité déviante, vectrice de la manipulation qui va induire de faux-souvenirs. Cela se fait par des expériences empiriques « faisant remonter les émotions ». C’est-à-dire, en jouant dans le seul registre de l’inconscient et de l’émotionnel, interprété par le gourou, qui met de la sorte la personne sous emprise… »

Pour lire la suite :

Psycho-spirituel et faux souvenirs

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– la destruction des parents

 L’histoire est « revisitée » en remontant jusqu’au berceau, à la conception et aux ancêtres. Le but étant de « révéler » les « blessures » subies par le malheureux enfant dans sa famille. Des « blessures » auxquelles aucun enfant n’échappe à moins que papa ou maman ne campe devant son berceau :

–  il (Bébé) pleurait la nuit dans son lit, parce qu’il avait faim et soif de lait et d’amour. Hélas sa maman n’est pas venue le consoler tout de suite. Résultat : sa confiance, exprimée par ses pleurs et ses cris, a été trahie ; désormais il ne peut plus croire à l’affection de ses parents (…) Il en vient donc à douter de leur amour (…) il ne croit plus à l’amour.

Et dont la gravité est sans appel :

« Puisque la relation d’amour à sa source – c’est-à-dire papa et maman, préfiguration du visage de Dieu- ne le comble pas, il coupe cette relation où il ne reçoit pas l’amour qu’il attend. »

A partir des « blessures » du berceau, suit la kyrielle de celles, habilement induites, graduellement de plus en plus graves jusqu’à de supposés actes infâmes.

Voir :

Paroles assassines

C’est l’étape où apparait l’enfant prétendument parfait, victime abîmée par les siens. Il reste un pas pour en faire :

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– L’enfant divin

On peut lire par exemple que « L’enfant manque de cet essentiel dont il a tant besoin, l’amour divin ». Ses parents sont un obstacle à sa « vocation initiale qui est de vivre la plénitude de l’amour divin. »

.A noter que cette vocation divine reste un mystère non élucidé, mais elle impose de terribles exigences :

 « …la restauration (…) du lien de la filiation, je suis ton fils et Toi, Seigneur, tu es mon Père. Car pour découvrir réellement que Dieu est Père, qu’il m’enfante comme une Mère, il faut prendre conscience des blessures paternelles et maternelles, et de l’obstacle qu’elles représentent dans la découverte intime de la paternité de Dieu envers moi : la guérison intérieure consiste à parcourir ce chemin de retour au Père. » 

Selon la théologie catholique, on devient enfant de Dieu par le baptême et un chrétien vit sa foi dans son humanité. Or dans cette « doctrine », pour être « enfanté » par Dieu il faut prendre conscience de la nocivité des parents. Sainte Bernadette disait dans sa grande simplicité et dans sa non moins grande sainteté : « Dieu est amour ». On ne trouve aucune trace d’amour dans cet enfant qui n’est plus humain mais « divinisé ». Sous la coupe de quel « Dieu » ?

Le tour de passe-passe continue : le père et la mère étant un obstacle et la démarche se voulant spirituelle, un théoricien a cherché dans le contenu de la foi catholique leur remplacement adéquat. Quoi de mieux que la Sainte Famille : « L’humanité du Christ et de la sainte Famille sont un véritable remède spirituel aux manques affectifs de l’enfance. » la Vierge immaculée remplace les supposées défaillances maternelles et saint Joseph les supposées défaillances paternelles !

Celui qui est devenu un adepte sans le savoir, cet enfant « divinisé » ne pouvait trouver sa place que dans la Sainte Famille, seule digne d’accueillir ce nouvel Enfant-Jésus. Désormais, il va s’investir dans cette pseudo religiosité délirante, qui sous prétexte de « retour vers le Père » va l’amener jusqu’à une régression humaine profondément déstructurante, puisque ces sessions vont toucher aux fondements de sa personnalité.

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Les conséquences désastreuses

 

– La déstructuration de la personnalité

Chaque étape de la vie sera revue en fracassant de plus en plus le for interne de la personne, en violant, à travers elle, l’intimité des liens familiaux et l’histoire des autres membres de la famille. Ils passeront, eux aussi, à travers le prisme déformant du psycho-spirituel, au mépris de ce qu’ils sont :  de leurs valeurs, de leur choix de vie, de la réalité, de leur histoire. Dans ce spectre opaque, tout ce qui est beau est inconnu et doit être sali. C’est une traque des « blessures » faite avec des mots violents. Certains faits suggérés sont sordides.

Voir pour le constater :

Les paroles assassines

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Il est inacceptable que de telles suggestions qui relèvent de faits divers, salissent des jeunes de milieux protégés, pour les défigurer, eux et leurs familles. Nous avons toujours connu dans l’Eglise des retraites qui élèvent l’esprit et font grandir. Comment se fait-il qu’il s’y fasse aujourd’hui une pléthore d’activités dites de guérison qui avilissent ?

C’est par ce passage à travers cette noirceur qu’une belle personne équilibrée, lumineuse, heureuse et vivante, va perdre tous ses repères jusqu’à une régression infantile inimaginable :

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– Le développement de l’ego

 L’esprit critique et la raison qui relèvent du rationnel, se sont faits éjecter, remplacés par le marasme des émotions induites facilement manipulables. C’est dans ce registre émotionnel, qu’avec des mots habilement et doucereusement insufflés, amplifiés en caisse de résonnance, que progressivement, en grattant de plus en plus le ressenti, qu’une personne privée de ses points de repère, perd pied et fusionne au discours imposé. C’est le délabrement psychique de mise sous emprise. Une personne normale en sort complètement chamboulée. Certaines ont eu de graves décompensations qui les ont conduites en psychiatrie L’adepte lui, pour le moment – et jusqu’à quand ? –  tient bon parce qu’il est en fusion parfaite avec son « gourou ».

Le nouveau manipulé vient de s’installer dans la régression infantile de son ego devenu son lieu de « guérison », et donc le centre de sa vie. Autant il est soumis à son « guide », son seul référent, son seul « conseiller », autant il impose aux autres le diktat de son ego.  Un diktat, et non des relations, puisqu’il ne réagit qu’à partir de ses besoins et de ses ressentis qu’il fait subir aux autres, dans une absence de sentiment à leur égard.  Il leur applique la maltraitance qu’il subit sans le savoir de son « gourou » : sa non-existence puisqu’il est traité comme un objet.

On peut constater que les adeptes ne sont bien qu’entre eux, parce qu’ils parlent le même langage, et obéissent aux mêmes doctrinaires. Les autres sont à « convertir » ou à oublier.

Pour avoir une idée simple de leur comportement avec leurs amis ou leurs proches, voir :

Moi et mon droit

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L’utopie de l’homme parfait

Comme nous l’avons vu précédemment, ce nouvel adepte, prisonnier de son ego blessé, est comme une marionnette entre les mains de son « maitre » qui le guide vers le but assigné devenu primordial : guérir de ses blessures. Condition sine qua non pour rentrer au paradis. Un programme de toute une vie…

Cette mise à plat de la personnalité se fait par le vecteur d’une doctrine-idéologie qui projette sur l’être humain son schéma type d’homme parfait, l’élite des croyants : l’homme guéri de ses blessures, re-né en enfant divin par un Jésus guérisseur qui le fait entrer dans la sainte famille en lui donnant ses parents : Marie et Joseph, seuls dignes de lui.  L’orgueil fou de l’homme qui devient son propre créateur dans ce meilleur des mondes, « virtuel », inhumain, terrifiant.

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– La négation de la finitude

Le piège du psycho-spirituel c’est de faire d’une personne une victime de ses proches, des autres. Elle est parfaite puisque tous ses maux viennent des autres. La prétendue victime est blanche comme l’agneau qui vient de naître. En revanche ses parents vont devenir de méchants loups qui l’ont laissé pleurer dans son berceau. A partir de cette blessure « gravissime » va se développer un délire qui passe par le cloaque des pires accusations…

Hormis les adeptes du psycho-spirituel, nous sommes tous coupables de notre finitude. C’est-à-dire d’être simplement des êtres humains. Les erreurs font parties de notre condition et nous servent à avancer, les blessures sont inhérentes à toute vie humaine. Une grand-mère en avait une bonne définition, elle disait « si nous ne pensions qu’aux « mouches » qui piquent, nous vivrions devant la porte avec un fusil. Il y a bien mieux à faire ». Oui, bien mieux : aimer. Un mot inconnu dans cette religiosité. Or les parents de ces enfants embrigadés, comme tous les parents, comme chacun, ont certainement commis des erreurs mais qui pourrait les prendre en défaut dans leur volonté d’aimer leurs enfants ? D’avoir donné leur vie au quotidien pour en faire des hommes et des femmes à l’avenir prometteur ? D’ailleurs, ces jeunes plein de promesses, ne sont-ils pas prioritairement visés par les recruteurs ? Ils sont la belle façade qui attire d’autres jeunes dans ce piège.

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– La liberté volée

Le malheureux adepte est loin de la notion d’amour, mort avec son histoire familiale. Il est enfermé dans le cursus de cette utopique renaissance salvatrice, qui passe par l’obligation d’engager un processus pour se « protéger » des siens. Il va donc les renier, les faire souffrir sans aucune humanité, sans aucune culpabilité puisqu’il est victime et qu’eux sont bourreaux. Pour leur enfant tombé dans la marmite de cette doctrine, ils portent non seulement la culpabilité de leur « malfaisance » mais aussi la responsabilité des actes qu’il « doit » leur faire subir pour pouvoir enfin se libérer de « leur mal » et au final d’eux.

Une question importante se pose : puisque le jeune n’est ni coupable, ni responsable, qu’est devenue sa liberté ?  Manipulé par son « gourou », son comportement avec les siens est celui d’un irresponsable. Les autorités ecclésiales pour se défausser, disent aux parents ravagés par ce qu’ils subissent, que leur enfant est majeur donc libre. En théorie sûrement, mais dans cette réalité, ses actes sous emprise démontrent qu’il est le contraire d’un homme libre.  Sa liberté, celle que lui ont donnée ses parents, n’est-elle pas devenue l’apanage de son « maître » ? Une liberté dont celui-ci connait l’enjeu et qu’il manipule à la perfection puisque le jeune subira des prières de « délivrance » visant à le « libérer des blessures » de ses parents, de ses ancêtres, etc. … Pour qu’il retrouve sa liberté !  Sous caution du « maître », n’en doutons pas.

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– La toute puissance mortifère

De quel droit ces « maîtres » s’arrogent-ils le droit de « revisiter une histoire familiale », c’est-à-dire de pénétrer l’intimité de tous les membres d’une famille qu’ils ne connaissent pas,  jusqu’aux ancêtres dont ils ignorent tout ? Le tout à travers une seule personne : ledit retraitant, en l’occurrence souvent un jeune, pour réinterpréter selon leur seule théorie pernicieuse le vécu familial de plusieurs générations. Ceci au nom de Dieu. Comment ces apprentis-sorciers ont-ils pu basculer dans une telle toute-puissance et y entrainer peu ou prou leurs adeptes ?

Il faut des années d’éducation, de patience et d’amour, pour apprendre à un enfant qu’il n’est pas tout puissant, qu’il ne peut tout faire, bref, pour le socialiser, le faire grandir en un mot : l’éduquer. Un jeune embrigadé dans ces théories psycho-sectaires, est très rapidement déconstruit. Des années de maturation sont balayées au point que ses proches ne le reconnaissent plus, ce qui les déstabilise profondément. Peu à peu, ils constatent en osant à peine le formuler que leur enfant fait tout pour les démolir. Il ne donne jamais de nouvelle. Il change souvent de communautés ou d’activités, au gré des responsables qui ne s’avèrent pas aimables lorsque les parents « osent » leur poser des questions, et attendre les réponses simples, auxquelles ils ont droit et qu’ils n’auront pas. Leur enfant averti d’une telle démarche de « lèse-majesté » va se mettre en colère et les traiter avec le plus profond mépris. Il semble qu’être communautaire implique d’être orphelin…D’ailleurs pour se débarrasser des parents gênants, leur enfant finira un jour par les accuser du pire : maltraitances, inceste etc. Il assène ses coups chaque fois qu’il le peut. Rien ne l’arrête pas même un parent malade ou mourant.  Toutes les questions vont passer par la tête des parents, y compris la folie de leur enfant. Sans réponse. Ils comprendront lorsqu’ils réaliseront que leur jeune vient de subir dans l’Eglise, toutes les étapes ébauchées dans ce document, sous prétexte de « revisiter son histoire sous le regard de Dieu » :

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– Les faux souvenirs

– la destruction des parents

– L’enfant divin

– La déstructuration de la personnalité

– Le développement de l’ego

L’utopie de l’homme parfait

– La négation de la finitude

– La liberté volée

– La toute puissance mortifère

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Lorsqu’ils prendront conscience que leur enfant est sous emprise mentale, qu’il est devenu un ersatz de son « gourou », formaté à sa ressemblance : un « Bébé-gourou », il sera trop tard. Le mal est fait ce n’est plus leur enfant qu’ils ont en face, c’est un ennemi, un être infatué de son ego, féru de son orgueil, infestée par une toute puissance morbide qui va de pair avec une perte d’humanité.

Un pantin aveuglé, soumis, dont le « gourou » tire les ficelles en lui faisant croire que c’est lui qui décide, qui veut, qui fait. Un adepte sous emprise, emprisonné dans son monde virtuel de restauration intérieure, dont personne ne connait le devenir. D’autant que s’il était séduisant, brillant, intelligent il sera chargé de recruter et de formater d’autres jeunes. Ce qu’il fera avec ardeur puisqu’il est au service de « Dieu ».

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